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Le Chevalier d'Olmedo (Analyse de la pièce)

Table des matières

Le Chevalier d'Olmedo

LE CHEVALIER D’OLMEDO

1. Contexte social, culturel et politique de l’auteur et son reflet dans la pièce

Lope de Vega (1562‑1635) fut l’un des dramaturges les plus prolifiques du Siècle d’or espagnol, avec près de deux mille pièces à son actif. Malgré les critiques visant la quantité plutôt que la qualité, il conserva son propre style et joua un rôle majeur dans le développement du théâtre espagnol.

Lope de Vega grandit au sein de l’Empire espagnol (1492‑1898), premier empire mondial s’étendant sur cinq continents. Ses œuvres reflètent les conditions sociales, culturelles, politiques et économiques de cet empire. Avant d’aborder la pièce, rappelons brièvement les caractéristiques de cette puissance.

Un empire réunit divers peuples sous une même autorité. Il privilégie la centralisation, une religion unificatrice, une armée puissante et surtout une politique d’expansion. L’Espagne correspondait exactement à cette description : monarchie, christianisme officiel, « Armada invincible » régnant sur les mers et conquêtes outre‑mer. C’est ainsi qu’a débuté ce qu’on appelle l’Âge d’or espagnol.

  • Le personnage de Fabia évoque la magie et la divination, signe que les croyances mystiques subsistaient.
  • Les corridas et jeux de l’anneau lors des fêtes de mai illustrent les traditions populaires, même si certains fanatiques s’y opposent.
  • À travers Doña Inés, on perçoit la place de la femme : le mariage est présenté comme sa principale motivation et la vie religieuse conserve une grande importance.
  • Le traitement sévère des Juifs et des musulmans sous la couronne de Castille révèle le climat politique de l’époque.
  • Les références aux pôles ou à l’Inde rappellent l’élan des grandes découvertes.

Tous ces éléments témoignent clairement de l’influence du contexte de l’auteur sur la pièce.


2. Époque de rédaction et influences sur l’œuvre

Le Chevalier d’Olmedo se situe à la fin de la Renaissance et préfigure le théâtre baroque. Ce courant mêle les formes antiques, médiévales et renaissantes tout en servant l’idéologie royale. Lope de Vega y développe sa « Comedia Nueva » valorisant la monarchie et l’identité nationale.

2. L’époque où la pièce a été écrite et son influence

Le Chevalier d’Olmedo est une pièce de la Renaissance. La Renaissance est la période historique située entre le Moyen Âge et la Réforme. En Italie aux XVe‑XVIe siècles, elle a rétabli le lien entre l’Occident et l’Antiquité classique (étude de Rome et de la Grèce antiques), ravivé la pensée expérimentale, mis l’accent sur la vie humaine (l’humanisme) et connu de profonds changements grâce à la diffusion de l’imprimerie.

La pièce, écrite vers la fin de la Renaissance, relève de ce que l’on appelle le théâtre baroque (1590‑1750). Ce théâtre, à la fois moralisateur et « école de politique », était une expression du théâtre de cour. Le théâtre baroque mêlait les formes du théâtre grec antique, du drame médiéval et du théâtre renaissant à l’idéologie de son époque. On y établit une hiérarchie des genres : tragédie, comédie et, intermédiaire, la tragi‑comédie. On s’éloigna des théories d’Aristote ; certains auteurs ne respectèrent pas la règle des trois unités ni la séparation stricte des genres. L’un des principaux précurseurs fut Lope de Vega, qui traça les grandes lignes des comédies de l’époque et créa un nouveau genre appelé « Comedia Nueva ». Ce genre, mettant en avant l’identité nationale, devint un élément unificateur de l’idéologie royale.

La Comedia Nueva repose sur quatre principes : satisfaire le goût du public, mettre l’honneur et la dignité au premier plan, exalter la monarchie et le nationalisme. La vision que Vega a développée est directement liée au théâtre baroque. Les crises économiques et les guerres en furent le moteur. La confiance dans l’harmonie de l’univers, prônée par les humanistes de la Renaissance, fut perdue et un pessimisme domina les écrivains. La doctrine catholique inculquait que l’homme, être mortel, n’était pas le centre du monde, poussant les auteurs vers une approche sociale et sombre.

Les auteurs baroques ont cherché divers moyens de surmonter les difficultés de cette époque. Les succès militaires passés furent exaltés et l’on produisit des pièces à fin heureuse pour réconforter le public. Les dramaturges espagnols suivirent cette voie d’évasion. L’insistance sur la justice en est l’aspect le plus marquant. Ne pas laisser impunis les méchants devint pour eux une question morale, l’objectif étant de renvoyer le spectateur chez lui heureux, apaisé et confiant. Ils choisirent donc des sujets divertissants et capables d’élever la spiritualité du public.

3. Le conflit principal de la pièce et les raisons de son choix

Le conflit principal oppose Don Alonso à Don Rodrigo. Ces deux personnages se disputent le même objet de désir et les valeurs qu’ils incarnent.

Tous deux veulent épouser la belle Doña Inés, fille de Don Pedro. Chacun échafaude un plan pour y parvenir et la pièce centre son intrigue sur leur affrontement. Finalement, aucun n’atteint son but.

Si l’on examine ces personnages comme des symboles de valeurs, Don Alonso porte des qualités plus positives que son rival Don Rodrigo. Loyal et valeureux envers sa patrie, sa famille et ses proches, il est assez généreux pour sauver Don Rodrigo lui‑même. Don Rodrigo, lui, est jaloux, déloyal et opportuniste, n’hésitant pas à tuer celui qui l’a sauvé. Cela causera sa perte.

Vega a choisi ce conflit en accord avec sa conception artistique. Nous avons évoqué plus haut que la « Comedia Nueva » repose sur quatre principes. Ces principes ont déterminé le conflit central de la pièce.

4. Les conflits secondaires

Le conflit intérieur de Don Alonso en est un exemple. Il hésite entre son devoir et la femme qu’il aime, puis doit choisir entre elle et sa famille. Il choisit sa famille et part. En chemin, il affronte un autre dilemme, entre raison et courage. Malgré les avertissements, il choisit une voie dangereuse, choix qui causera sa mort.

Lorsque Don Rodrigo est terrassé par le taureau, Don Alonso vient le sauver. Don Rodrigo, malgré lui, doit saluer son rival. C’est son conflit intérieur : loyauté ou trahison.

On peut citer d’autres petits conflits : Doña Inés en opposition avec son père ; le conflit de valeurs entre Tello et Don Fernando, le premier orientant son maître vers le bien, l’autre poussant son ami vers le mal.

5. Le style de l’auteur et son reflet dans la pièce (sujet, personnages, époque, langue, rythme, dialogues et forme)

Pour Lope de Vega, le point crucial est la monarchie. La pièce doit d’une manière ou d’une autre servir la couronne. C’est le cas dans Le Chevalier d’Olmedo, qui se déroule au temps du royaume de Castille. Le roi castillan y est présenté comme garant de la justice. Exalter la royauté permettait à Vega de renforcer l’autorité du roi et de susciter une confiance sans limite.

Trois motifs régissent l’action de ses pièces : l’amour, la jalousie et l’honneur. On les retrouve tous dans Le Chevalier d’Olmedo : l’amour entre Don Alonso et Doña Inés, la jalousie de Don Rodrigo envers Don Alonso et l’honneur constamment évoqué. Chez Vega, l’amour peut réunir une famille ou motiver l’action des jeunes amoureux. La jalousie, cause de défis ou d’intrigues, se manifeste par des déguisements ou par l’attente inquiète au coin de quelque ruelle sombre. Il existe une scène où Don Rodrigo guette ainsi Don Alonso. L’honneur est traité soit comme la chasteté au sein de la famille, soit comme la lutte pour le prestige dans la société ; dans la pièce, c’est l’honneur social qui est mis en avant.

Vega attachait de l’importance à mêler des intrigues très tendues à des éléments comiques. On voit la tension dans les corridas et la mort de Don Alonso. Des personnages comiques comme Tello et Fabia apportent une pointe d’humour à ces scènes. Les critiques partisans du théâtre classique n’appréciaient pas ce mélange, mais Vega persista dans son style. Il associa tragique et comique, affirmant que l’union du sérieux et du drôle divertissait le public.

Autre divergence de Vega d’avec le théâtre classique : la forme. Selon lui, une pièce devait comporter trois actes. Le Chevalier d’Olmedo en compte aussi trois. Chaque acte représentant un jour, cette conception s’écartait de l’unité de temps classique.

Dans le théâtre de Vega, l’intrigue principale s’enrichit d’histoires secondaires. La scène de flirt entre Tello et Fabia en est un exemple. Exposition, nœud et dénouement sont pour lui essentiels. Le nœud ne doit se défaire qu’à la scène finale afin de maintenir l’intérêt du public. Ainsi en est‑il dans Le Chevalier d’Olmedo. La langue est simple, accessible à tous, avec un récit fluide qui ne fatigue pas le spectateur.

Vega insiste aussi pour que la scène ne soit jamais vide ni silencieuse, ce qui donne à ses pièces un rythme soutenu. Le Chevalier d’Olmedo présente lui aussi un rythme vif et beaucoup d’action.

Enfin, Lope de Vega prône le réalisme dans la création des personnages : celui qui joue le roi doit agir en roi, celui qui joue la voyante en voyante, etc. On y trouve donc des types fixes : le beau chevalier, la belle princesse, la devineresse, l’écuyer…

En résumé, notre auteur a tracé les limites de son propre théâtre en passant outre certaines règles classiques, et c’est dans ce cadre qu’il a écrit Le Chevalier d’Olmedo.

6. Les dynamiques essentielles attestant que la pièce appartient à son auteur

On peut énumérer ainsi les éléments prouvant que Le Chevalier d’Olmedo est bien une œuvre de Lope de Vega :

  • La pièce mêle à la fois tragédie et comédie (tragicomédie)
  • Elle traite avec sensibilité des thèmes d’honneur, de vertu et de réputation
  • Elle aborde l’amour, la vaillance et la jalousie
  • Elle rompt avec la règle des trois unités
  • Elle adopte une vision positive et élogieuse de la monarchie
  • Son aspect moralisateur
  • Sa longueur et son rythme
  • La représentation des coutumes de la classe moyenne

7. Les textures culturelles et les orientations dans la pièce

La pièce nous fournit des idées sur la structure familiale espagnole. La famille de Don Pedro, Doña Inés et Doña Leonor comprend trois personnes, tout comme celle de Don Alonso. Dans ces familles pouvant être considérées comme de la classe moyenne, on valorise compréhension, confiance et loyauté.

Toujours grâce à la pièce, nous pouvons entrevoir la structure du pays où elle se déroule : une monarchie où l’État et l’Église agissent de concert. La religion officielle est le christianisme et les autres cultes minoritaires ne bénéficient d’aucune tolérance.

Les relations humaines présentent aussi certains traits caractéristiques : la communication par lettres, le mode de flirt des jeunes et leurs passions. Le personnage de Fabia sert de messagère, montrant le rôle joué par les vieilles femmes dans les relations amoureuses des jeunes.

Les Fêtes de mai occupent une place importante. On y pratique des activités telles que les corridas ou le jeu de l’anneau, qui permettent aux gens de se rencontrer. Les habitants les plus habiles de la ville s’y affrontent et attirent un large public. De nos jours encore, ce type de manifestation culturelle perdure en Espagne.

8. Les caractéristiques biologiques, psychologiques et sociologiques du protagoniste

Don Alonso est beau et fort. Il est fidèle et dévoué envers ceux qu’il aime. Il vit ses sentiments avec passion. Il est fier, discipliné et serviable. Chevalier issu de la classe moyenne, il est le protecteur du royaume.

9. Manière dont les événements révèlent la biologie, la psychologie et la sociologie du protagoniste

Nous apprenons les traits physiques de Don Alonso par les autres personnages, qui nous disent qu’il est beau et que toutes les jeunes filles de la ville en sont éprises. Sa force apparaît lorsqu’il terrasse les taureaux ou qu’il sauve son rival. L’auteur nous montre ses caractéristiques biologiques en le soumettant à diverses épreuves ou en les faisant raconter. Sa psychologie se dévoile de la même façon : il aime passionnément, vit ses émotions à l’extrême, se montre sensible et fidèle envers sa bien‑aimée et sa famille, tend la main à son rival et fait preuve d’altruisme. Connaissant son destin, il ne renonce pas et montre son orgueil. Sa profession nous renseigne aussi sur sa sociologie : il est un soldat au service du roi et du royaume. Tout au long de la pièce, l’auteur le décrit ou le fait décrire par d’autres. Le protagoniste agit et nous avons ainsi l’occasion de mieux le connaître.

Bibliographie

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